« L'homme n'a pas de nature – écrivit Ortega y Gasset – ce qu'il a c'est une histoire ». Les éléments constitutifs de l'homme (mobilité, changement, etc.) caractérisent également les peuples, les communautés, les territoires : pour savoir ce qu'est une nation, il faut avant tout chercher à savoir comment elle est parvenue à être ce qu'elle est. Nations, États, régions ne sont pas des essences permanentes et univoques : la nation comme « communauté imaginée », idéalisée et éternelle, fut une invention du nationalisme politique et littéraire des XIXe et XXe siècles. Et la vérité historique nous enseigne que les nations (et parmi elles l'Espagne...) furent et sont des héritages mixtes, le résultat de l'intégration au cours des siècles de différents substrats ethniques, démographiques et culturels : elles sont donc des réalités politiques et sociales historiques, c'est-à-dire changeantes et ouvertes. Ce livre étudie la construction de l'Espagne comme nation depuis les Rois Catholiques. Il veut être, à la fois, une vision non essentialiste de la formation de l'Espagne, et une vision non nationaliste du problème des nationalités et des nationalismes. Juan Pablo Fusi se livre à une analyse éclairante et opportune de cette histoire et à une brillante réflexion sur la question centrale de la lutte politique dans l'Espagne contemporaine.