Sarmiento a fait couler beaucoup d’encre. Il a inspiré des amitiés et des haines si tenaces qu’elles se sont transmises aux nouvelles générations. Aujourd’hui encore, on souille de temps en temps ses statues, ou bien on les couvre de fleurs. Puisque certains historiens de nos jours glorifient Rosas et d’autrescaudillos, il est normal que l’ennemi irréductible de ceux-ci prenne son poste dans la lutte renouée. Toutefois ce n’est pas une raison politique qui a guidé notre choix. Celui-ci nous a été imposé par plusieurs considérations. En premier lieu, c’est pendant la dictature de Rosas que Sarmiento a écrit le meilleur de son œuvre, tous les livres qui l’ont rendu célèbre. En outre, pendant la même période, on assiste à l’éclosion d’une pensée argentine caractéristique, et d’une littérature originale. Une vie intellectuelle intense se développe à Buenos Aires avant l’émigration de ses principaux représentants, alors que Sarmiento a plus de vingt cinq ans. Au Chili, où se réfugient plusieurs jeunes écrivains argentins, on voit bientôt également une littérature prendre forme. Les grands projets des héros de l’indépendance se réalisent, l’éducation et l’immigration s’organisent. Sarmiento est le plus zélé défenseur de l’une et de l’autre.